Critique
A Bercy, le groupe Queen sans sa reine morte
LE MONDE | 25.09.08 | 15h59 • Mis à jour le 25.09.08
Le groupe de rock britannique Queen a joué, mercredi 24 septembre, au Palais omnisports de Paris-Bercy, et sur les portes était affichée l'annonce d'un concert d'Elvis Presley. Nous sommes bien en 2008, et pas dans la quatrième dimension. Le rock, qui a horreur du vide, commerce avec l'au-delà. Bien sûr, le King sera virtuel, seulement en voix et en images, car irremplaçable. On pensait de même pour Freddie Mercury, le chanteur de Queen, mort en 1991, ou pour Jim Morrison, celui des Doors, disparu vingt ans plus tôt. Mais leurs groupes tournent encore, sans leur icône et amputés de la moitié de leurs membres originels.
Consultez les dépêches vidéo des agences AFP et Reuters, en français et en anglais.
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Ancien vocaliste de Free, groupe qui était - caution suprême - apprécié de Mercury, Paul Rodgers occupe la place du mort. Cet amoureux du blues passe l'audition en chantant à sa manière, en se tenant prudemment à distance des fantasmes opératiques du défunt. Le tube de Free, All Right Now, est même intégré au répertoire.
Mais le boulet éternel de Queen, c'est le guitariste, Brian May, qui profite de la discrétion de Rodgers pour capter cette lumière que lui volait Mercury. Ses interventions sont interminables et indigestes. L'autre "historique" est le batteur Roger Taylor. Ils sont accompagnés par trois anonymes. Consigne a apparemment été donnée de ne jamais les faire apparaître sur l'écran. Ce petit monde ne cesse d'entrer et sortir comme dans une comédie de boulevard - rien à voir avec la farce macabre des Doors sans Morrison.
Pour prouver que leur entreprise n'est pas seulement funèbre, Queen et Rodgers viennent de publier un nouvel album, Cosmos Rocks, dont ils présentent des extraits. C'est un objet d'une absolue inanité qui prouve que, sans l'art du vaudeville de Mercury, Queen se transforme en banal groupe de heavy rock.
Sinon, comme attendu, les tubes tombent : Another One Bites the Dust, I Want to Break Free ou Bohemian Rhapsody, avec intervention au chant et à l'écran de Mercury. We Will Rock You et We Are the Champions font lever le public, comme lors de la Coupe du monde 1998. En sortant, on s'amuse à imaginer ce que le rock pourrait encore inventer. Associer les deux moitiés, complémentaires, des Beatles et des Who ?
Bruno Lesprit